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29 octobre 2013 2 29 /10 /octobre /2013 14:22
Bretagne : pourquoi Hollande doit tenir bon sur l’écotaxe
Pascal Riché | Cofondateur Rue89

 

Des manifestants, opposés à l’ecotaxe, bloquent une route à Pont-de-Buis (Finistère), le 26 octobre 2013 (FRED TANNEAU/AFP)

Les images qui viennent de Bretagne sont spectaculaires : on affronte, on cogne, on détruit des installations publiques. Un manifestant a une main tranchée. Une main tranchée ! Les médias parlent avec respect de cette « contestation » (on n’est pas en Seine-Saint-Denis, tout de même).

Les écolos sont discrets, alors qu’ils devraient pour une fois jouer leur rôle et défendre cette taxe imaginée au départ pour réduire les gaz à effets de serre. La droite fustige sans vergogne ce « nouvel impôt »... qu’elle a elle-même mis en place. L’écotaxe, alias « impôt Borloo » est en effet une des avancées du Grenelle de l’environnement de 2007.

Valérie Pécresse s’enflamme contre cette taxe, « goutte qui fait déborder le vase ». Jean-Louis Borloo lui même propose courageusement de reporter l’impôt qui porte son nom et de le « remettre à plat » !

Il faut ici rappeler de quoi il s’agit. Trop de marchandises transitent par camion en France : c’est polluant, cela émet des gaz à effet de serre, cela congestionne les routes. L’idée de l’écotaxe est de remédier à ces problèmes, en favorisant le fret ferroviaire, le fret fluvial et en favorisant, par de nouveaux investissements, une relocalisation de l’économie : est-il très logique qu’un porc breton parte en Allemagne pour revenir sous forme de tranches de jambon dans les grandes surfaces ? Ne serait-il pas plus malin d’investir davantage localement dans la salaisonnerie ?

Un impôt intelligent

Avec l’écotaxe, il s’agit de prélever une dîme (ou plutôt un octroi, diront les puristes) sur les camions de plus de 3,5 tonnes qui, au nombre de 800 000, circulent sur le réseau national non payant. Les camions passent sous des portiques, qui les identifient et enregistrent leur passage. Un parcours de 100 kilomètre coûtera, en fonction des camions, entre 8 et 14 euros.

Un impôt intelligent, donc, puisqu’il prépare une vie meilleure pour tous. Il n’est d’ailleurs pas sorti de la tête de Nicolas Sarkozy ou de Jean-Louis Borloo : plus de dix pays européens ont mis une écotaxe en place.

Les Bretons ont fait valoir, à juste titre, deux désavantages par rapport aux autres régions :

  • ils n’ont que des routes gratuites, y compris leurs voies express issues du plan routier des années 70 ;
  • la Bretagne occupe une place périphérique par rapport à l’Europe : ses producteurs doivent donc davantage avoir recours au transports.

Des aménagements ont donc été trouvés. L’écotaxe a été minorée de 40% pour la Bretagne (recettes en moins pour l’Etat : 40 millions). Ce n’est pas tout : la RN 164 a été exclue du réseau taxable, ainsi que les routes départementales et communales (recettes en moins pour l’Etat : 24 millions d’euros). Comme leconstate Ouest-France :

« Aujourd’hui l’écotaxe devrait générer 42 millions d’euros de recettes en Bretagne, compte tenu du trafic estimé, bien loin des chiffres faramineux parfois avancés. C’est moins de 4% du produit total attendu pour tout le pays. »

Les syndicats agricoles profitent de la situation

L’écotaxe doit conduire à une majoration moyenne de l’ordre de 4,1% du coût du transport. Pour un camembert, cela représente un centime.

« En comparaison, l’effort fait par l’Etat sur le financement des infrastructures pour désenclaver la Bretagne est bien supérieur. L’Etat met 135 millions par an dans le financement des infrastructures (ligne à grande vitesse Le Mans-Rennes, routes nationales et réseau ferroviaire classique). »

La Bretagne connait actuellement une crise difficile, mais celle ci n’est pas liée à l’écotaxe. Elle est liée aux problèmes de Doux, de Tilly Sabco, de Gad, ou de PSA. Les syndicats agricoles locaux, FDSEA du Finistère en tête, profitent de la situation pour pousser encore plus loin leur approche productiviste et polluante de l’agriculture. Une approche qui manque depuis des années de clairvoyance.

Avec cinq fois plus de cochons que de Bretons, la région est bien avancée. Du porc bas de gamme, des poulets bas de gamme et des flots de lisier qui viennent polluer la nappe phréatique et bloquent le développement du tourisme : est-ce là le modèle de développement que désirent les Bretons ?

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